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08/07/2024

En premier, ne pas nuire

Dès mon arrivée au sein de l’association AVA – Agir pour la Vie Animale, il y a bientôt 6 ans, l’une des premières choses que son Président, le Dr vétérinaire Thierry Bedossa, m’a enseigné, est : « Primum non nocere », locution latine qui veut dire : « En premier, ne pas nuire ». Cela signifie que dans chacune de nos actions, nous devons toujours nous interroger, avec humilité, sur les conséquences de nos actes et notre capacité à nuire, volontairement ou non, aux animaux.

Ces six années d’expérience m’ont démontré qu’on fait souvent plus de mal aux animaux qu’on ne le croit pas. Même dans la Protection Animale, la « PA ». On s’érige souvent en super-héros des animaux sans même s’apercevoir qu’on agit avec un point de vue d’humain, et que les conséquences pour l’animal qu’on croit sauver, elles, peuvent être dramatiques. J’en ai eu de nombreuses fois l’illustration, notamment avec des chiens et chats nés libres et errants, qu’on croit « sauver » parce qu’on a pitié de leur vie « de misère » dans la rue, et pourtant, une fois devenus « animaux de compagnie », ces animaux finissent par souffrir de la captivité et de cette vie qu’on leur impose. C’est un exemple flagrant, mais pas le seul.

Thierry Bedossa dit souvent que dans la « PA », il faudrait « mettre de la connaissance là où il y a tant de bienveillance ». C’est pour cette raison qu’AVA est sans doute la seule association de protection animale à soutenir la science et la recherche éthique. Nous sommes convaincus que pour protéger les animaux au mieux, il faut d’abord les comprendre, et cela, c’est la science qui le permet. Notre précieux partenariat avec l’ANRT (Association Nationale de la Recherche et de la Technologie), le CNRS et de prestigieuses universités (Paris Nanterre et Aix-Marseille), nous permet de co-financer des thèses de doctorat scientifiques, lesquelles contribuent à accroître nos connaissances sur les animaux et en particulier les chiens.

Nos participations à de nombreux congrès scientifiques à travers le monde sont autant d’occasions, chaque année, de « faire le plein de connaissances » et s’enrichir de nouveaux savoirs en fonction des avancées scientifiques. Du 21 au 23 juin dernier, nous sommes allés au Canine Science Conference organisée par la Canine Science Society, à l’Université de Washington à Seattle, aux Etats-Unis. La première fois que Thierry m’avait emmenée à ce congrès, il y a deux ans, à l’Université Colgate de New York, cela avait été pour moi une révélation : j’avais alors compris pourquoi soutenir la science était important. J’avais compris que les études scientifiques permettent d’expliquer et de comprendre les comportements des chiens.

L’édition 2024 a davantage été l’occasion de réfléchir. Réfléchir à nos pratiques, réfléchir au sens de nos actions, réfléchir à ce que nous faisons d’utile pour les animaux ou, au contraire, de futile et/ou d’anthropocentré. Il a été plusieurs fois question durant ce congrès d’études relatives à la vieillesse du chien : qu’est-ce que la science nous dit aujourd’hui pour permettre au meilleur ami de l’Homme de vivre le plus longtemps possible ? C’est à cette question que tente de répondre le Dog Aging Project, une vaste étude participative menée sur 60 000 chiens. Mais cette quête d’immortalité de l’animal, comme chez l’humain, soulève de nombreuses problématiques : est-il éthique de sacrifier des souris de laboratoire pour chercher des remèdes miracles au vieillissement, à la maladie, à la détérioration du cerveau… ? Est-il éthique d’aller contre-nature en repoussant sans cesse les limites physiques et cognitives d’un individu ? Est-il éthique de pousser son animal jusque dans des âges canoniques sans réussir toutefois à évaluer sa qualité de vie ?

Alors, finalement, à trop vouloir mettre la science au service de nos intérêts (« je ne veux pas voir mourir mon animal »), ne finirait-on pas par nuire au vivant ?

Ce qui est intéressant avec la science, c’est que tout est question de philosophie. Nous étions d’ailleurs accompagnés à ce congrès par Tom Gignoux, un étudiant vétérinaire, que Thierry souhaitait initier à la science indépendante. Les études présentées au Canine Science Conference ne sont en effet pas financées par des industriels, laboratoires ou petfooders. Elles ne sont donc pas conduites en fonction des intérêts du marché, et c’est en cela qu’elles ont une valeur ajoutée, puisque supposées « objectives ». Tom, qui a 25 ans, est un féru de science. Sa foi absolue et inébranlable en la science est opposée à ma vision anti-relativiste socratique : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien », a dit Socrate. Avoir pour seule connaissance le fait que l’on est ignorant est le seul moyen de rester en quête du savoir.

En résumé, ce congrès a surtout éveillé mon esprit critique, et confirmé une conviction profonde : il est nécessaire de confronter ce que nous dit la science à nos expériences de terrain pour se rapprocher le plus possible de la Vérité. C’est la philosophie d’AVA et la façon dont nous tâchons d’œuvrer chaque jour dans toutes nos actions.

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